Lattaquié-SANA
Sur la colline de Ras Chamra au nord de Lattaquié, se trouve une ville syrienne qui a offert au monde le premier alphabet écrit et la première note musicale inscrite dans l’histoire.
C’est Ougarit, capitale d’un royaume ayant le même nom, qui a prospéré aux XIVe et XVe siècles avant J.C., et qui était un centre commercial et culturel unique de la Méditerranée orientale, là bas, où les langues se croisaient et les savoirs s’enrichissaient, et la parole s’est transformée en outil de civilisation.
Origine de nomination et découverte

Le terme « Ougarit » dérive du mot akkadien « Ougarou » signifiant « champ » ou « citadelle fortifiée ». Ses vestiges furent découverts fortuitement en 1928 lorsqu’un paysan labourant son champ met au jour une tombe.
En 1929, une mission archéologique française dirigée par Claude Schaeffer a été formée. À chaque couche d’antiquités découverte sur ce site, des fragments d’un passé prestigieux émergeaient, laissant son empreinte dans les domaines de l’écriture, de la musique et de la pensée.
Le premier alphabet et la musique notée

Le chercheur en archéologie, Bassam Jamous, a indiqué qu’Ougarit était la première qui a offert à l’humanité un alphabet complet composé de 30 lettres, gravé sur une tablette d’argile.
Il a précisé qu’il s’agit, du plus ancien système d’écriture phonétique connu dans l’histoire. Le linguiste français Charles Virolleaud l’a qualifiée de « véritable miracle dans l’histoire de la langue ».
Ougarit ne s’est pas arrêtée aux mots : elle a également excellé dans le domaine musical. Où on a retrouvé la première notation musicale connue dans l’histoire, gravée sur l’une de ses tablettes, celle d’un hymne intitulé « Nîgal », basé sur une échelle heptatonique à caractère oriental, ce qui fait d’Ougarit un berceau de la musique classique.
Ville de culture, de diplomatie et d’industries

Ougarit était bien plus qu’une simple ville, elle représentait un centre d’innovation dans tous les domaines. Ses bibliothèques contenaient des milliers de tablettes d’argile documentant la vie politique, économique et religieuse en manière sophistiqué inédite.
Elle était également reconnue par sa diversité linguistique et culturelle. Ses textes étaient rédigés en plus de sept systèmes d’écriture cunéiforme, dont l’akkadien, le hittite, l’égyptien ancien, le sumérien et le chypriote, faisant d’Ougarit un centre de communication entre les civilisations.
En ce qui concerne l’économique, Ougarit constituait un important centre industriel maritime, célèbre pour sa construction navale, sa joaillerie, la fabrication de meubles en ivoire, les textiles et les sceaux.
Statut politique malgré l’absence d’une armée:
Ougarit n’était pas un royaume militaire, mais sa puissance douce résidait dans ses savants, ses artisans et ses artistes, qui ont consolidé son rôle politique parmi les royaumes du bassin méditerranéen aux XIVe et XIIIe siècles avant J.C.
Jamous affirme que « les rois d’Ougarit ne s’appuyaient pas sur les soldats, mais plutôt sur le savoir, la pensée et l’habileté artisanale pour imposer le respect aux niveaux régional et international ».
Découvertes récentes:
La mission archéologique nationale syrienne, dirigée par Khozama Al-Bahloul, a récemment mis au jour de nouvelles tablettes d’argile contenant des documents juridiques, des contrats de vente et d’achat, ainsi que des textes pédagogiques et d’autres relatifs à la délimitation des frontières avec les royaumes voisins. Ces découvertes démontrent les systèmes administratifs et diplomatiques avancés à cette époque.
Jamous souligne que la majeure partie des archives ougaritiques restent enfouie, ce qui signifie que l’avenir réserve encore plus de surprises qui pourraient changer notre vision de l’émergence des civilisations.






Ibtissam / R.Fawaz